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Lyme : une épidémie silencieuse ?

PEU CONNUE ET SURTOUT PEU RECONNUE PAR NOTRE SYSTÈME DE SANTE, LA MALADIE DE LYME BOULEVERSE LE QUOTIDIEN DE MILLIERS DE PERSONNES CHAQUE ANNÉE EN FRANCE. D’OU VIENT-ELLE ? QUELS EN SONT LES CAUSES ET LES SYMPTÔMES ? EXISTE-T-IL DES MOYENS DE S’EN PRÉMUNIR ?

UNE PATHOLOGIE PAS TOUTE JEUNE

Egalement appelée borréliose de Lyme, la maladie de Lyme est une infection bactérienne transmise à l’homme par piqûre de tiques. Les premières anomalies de la peau pouvant lui être associées sont détectées en 1883 par un médecin Allemand, Alfred Buchwald. A l’époque, aucun lien avec la bactérie n’est officiellement établi. S’il semblerait qu’elle existe depuis bien plus longtemps, les premiers cas reconnus font leur apparition aux Etats-Unis en 1975.

 

Au cœur de la petite ville de Lyme (Connecticut), qui donnera son nom à ce fléau, des centaines d’enfants sont alors contaminés par une épidémie d’arthrite rhumatoïde. Cependant, le lien avec la bactérie Borrélia ne sera clairement identifié que 7 ans plus tard par le biologiste William Burgdorfer.

UN FLÉAU TENACE

Présente aujourd’hui dans plus de 65 pays, la borréliose de Lyme touche majoritairement les zones tempérées et froides de l’hémisphère Nord (Afrique et Amérique du Nord, Europe). Souvent confondue avec d’autres pathologies et mal diagnostiquée, elle occasionne de réelles souffrances chez les personnes atteintes. On lui distingue trois grandes phases :

Phase 1 : similaires à ceux d’une grippe, les symptômes surviennent quelques heures voire 10 jours après la morsure d’une tique infestée (fourmillements, légère fièvre, manifestations cutanées et articulaires, etc.).

Phase 2 : les manifestations commencent à se répandre dans tout l’organisme (courbatures, grande fatigue, douleurs maxillaires, douleurs articulaires et rhumatologiques, manifestations nerveuses, manifestations cardiaques, manifestations oculaires, etc.).

Phase 3 : cette phase se déclare généralement durant les mois voire les années qui suivent la morsure. A ce stade la maladie devient chronique et les manifestations s’aggravent (troubles gastro-intestinaux, troubles neuro-musculaires, arthrite, sinusite à répétition, sifflements dans les oreilles, manifestations respiratoires, etc.).

Marie Bernard, jeune orléanaise de 21 ans, vit avec la maladie depuis maintenant 3 ans. Elle nous raconte son combat quotidien :

« Ma maladie s’est complètement déclenchée en 2015 suite à plusieurs jours d’angoisse sévère. […]. C’est ainsi que mon cauchemar a commencé : maux de tête sévères, épuisement intense, pression dans la tête, douleurs abdominales, nausées, etc. […] J’ai vu de nombreux médecins, cela a été une longue errance médicale, avec une étiquette de dépression / anorexie posée très rapidement par des médecins (parfois arrogants) et par ma famille. Je me suis sentie longtemps seule, en colère et profondément triste. ».

Des symptômes du plus bénin au plus grave, auxquels s’ajoute un profond sentiment d’isolement et d’incompréhension. Alors que faire face à ce que certains médias qualifient de « nouvelle peste » ?

LA FRANCE EN RETARD

Si beaucoup semblent la prendre au sérieux – elle est la 7ème infection la plus détectée aux Etats-Unis – d’autres sont encore à la traine. En France notamment, où l’on déplore plus de 27000 cas par an – un chiffre très loin de la réalité d’après les associations – les malades doivent souvent patienter de nombreuses années avant d’être diagnostiqués, et de recevoir un traitement adéquat.

Pourtant en 2006, l’OMS avait déjà tiré la sonnette d’alarme « La maladie de Lyme est la maladie à transmission vectorielle* la plus courante en Europe ». Pour le professeur Perronne, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales, « la maladie explose ». En effet, 33202 cas ont été recensés en 2015 par le réseau de médecins Sentinelles, contre 26146 en 2014. L’OMS met en avant trois facteurs favorisant la prolifération de la bactérie : le réchauffement climatique, l’augmentation de la population d’animaux porteurs de tiques, et le développement des activités en pleine nature.

Quid du Loiret ?

Parmi les régions les plus touchées, l’Est et le Centre sont celles qui présentent le taux de progression le plus élevé. Du fait de sa forte concentration de zones forestières, le Loiret apparaît comme une région à risque. L’équipe locale de l’association « Lyme Sans Frontières » y a d’ores et déjà organisé plusieurs évènements, dont la première manifestation « Lyme Protest », à Orléans le 28 octobre 2016. Une journée de rencontre et d’échanges qui connaîtra un franc succès, et confirme un constat sans appel : il est urgent d’agir.

 

 

 

 

Alors pourquoi un tel retard dans l’hexagone ? D’après certains spécialistes, les difficultés de diagnostic seraient dues aux manifestations diverses et variées de la maladie. Pourtant, détectée dans le mois qui suit la morsure de tique, l’infection se soigne facilement par des antibiotiques. Au-delà, les choses se compliquent. Corinne Eyot-Dayrès, de l’association France Lyme, explique : «  Lyme est considérée comme une maladie rare, les médecins n’y pensent pas. Ils ne sont pas formés pour cela. »

Il est toutefois possible de réaliser des tests de dépistage (Elisa, Western-Blot), mais leurs résultats seraient loin d’être sûrs.

DES AUTORITÉS ABSENTES 

Des examens peu fiables, un traitement coûteux, l’absence de prise en charge et un quotidien qui vire au cauchemar, il n’en fallait pas plus pour faire réagir certains membres du corps médical. En juillet 2016, des centaines de médecins ont adressé une lettre ouverte à la Ministre de la Santé Marisol Touraine. Ils y réclament des financements pour améliorer les tests de dépistage jugés inefficaces, et dénoncent l’entêtement du gouvernement à prétendre le contraire. Ils demandent également que soit enfin reconnue la « détresse morale majeure mais aussi socio-professionnelle de ces patients en errance diagnostique pendant plusieurs mois ou années ».

Certains malades prennent eux-mêmes les choses en main : en mai 2016, 130 membres du collectif Lymaction lancent une action en justice contre l’Etat et le laboratoire Biomérieux, qui commercialise le test Elisa.

 

Le 15 février dernier, ce sont 59 autres patients qui portent plainte pour « conflit d’intérêt entre laboratoires et autorités » et « mise en danger de la vie d’autrui ». Une plainte qui vise les deux Ministres de la Santé, ainsi que l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et le Centre national de référence (CNR). Ils demandent que l’Etat reconnaisse officiellement Lyme comme maladie chronique, et apporte un financement pour les recherches et la prise en charge des traitements.

Même s’il faudra encore patienter de nombreuses années pour que ces démarches aboutissent, la bataille judiciaire a bel et bien commencé. Médecins et patients sortent peu à peu du silence pour que cesse enfin le calvaire de ceux qui souffrent depuis trop longtemps.

 

DÉFINITIONS :

*Maladie à transmission vectorielle : maladie transmise par des vecteurs. Ces vecteurs sont des arthropodes hématophages qui assurent une transmission active (mécanique ou biologique) d’un agent infectieux d’un vertébré vers un autre vertébré. Il s’agit essentiellement d’insectes et d’acariens hématophages.

Source : http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infectieuses/Maladies-a-transmission-vectorielle

LIENS UTILES :

Que faire en cas de morsure ?

http://www.environnement.brussels/thematiques/sante-securite/ma-sante-au-quotidien/tiques-et-maladie-de-lyme-savoir

 

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