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Victoire Royale à l’APLEAT #TOP1

Il y a peu de temps nous assistions à l’Orléans Game Show, cet événement gaming, organisé par
l’association OREGAMI à permis de faire découvrir à près de 6000 Orléanais le monde du jeu
vidéo.

Au cours de cet événement nous avons pu rencontrer l’APLEAT et plus particulièrement leur
antenne « La Station » accueillant les jeunes jusqu’à 23 ans.
Basée à Orléans l’Association pour l’Écoute et l’Accueil en Addictologie et Toxicomanies travaille
sur toutes les addictions et notamment l’addiction aux jeux-vidéos.

Outre le jeu-vidéo l’Apleat et la Station accueillent majoritairement des personnes ayant des
addictions au niveau tabac, alcool et drogues. La branche de l’addiction aux jeux-vidéos ne
représente que 6% des consultation soit une centaine de jeunes sur Orléans. Afin de comprendre ce
phénomène nous avons pu les rencontrer.

Notre demande d’entretien nous mène à La Station, au 10bis Boulevard Rocheplatte à Orléans où
nous avons le plaisir de rencontrer Nicolas et Azélie.
Nicolas, Chef de service à la Station travaille depuis de nombreuses années sur l’antenne des moins
de 23 ans, il a pour mission de manager ses équipes, d’informer, d’évaluer et de prendre en charge les
jeunes quelque soit leurs addictions.
Azélie, travailleuse sociale intervient pour la moitié de son temps à la Station et à l’APLEAT sur
l’accompagnement spécifique des joueurs, englobant les jeux-vidéos mais également les jeux de
hasard et d’argent.
L’autre moitié de son temps s’effectue au Centre Pénitentiaire d’Orléans-Saran où elle consulte les
détenus incarcérés pour une prise en charge de toutes leurs addictions.

A travers différents points nous avons pu discuter avec eux et tenter de comprendre au mieux le
phénomène de jeu excessif.

 

♦ Les chiffres de l’Apleat
L’addiction aux jeux-vidéos représente donc un suivi d’une centaine de jeunes au niveau de
l’APLEAT et de la Station. Le but de l’association est de faire le point et de suivre les jeunes,
généralement accompagnés de leurs parents, sur leurs conduites addictives au niveau du jeu vidéo.
Globalement le public est plus jeune que pour l’addiction à d’autres produits, majoritairement entre
13 et 21ans avec des exceptions comme des joueurs ne dépassant pas les 10ans.
Le plus souvent incités et/ou amenés par les parents ou orientés par l’école, environ 20% des joueurs
viennent d’eux-même afin de faire le point et parfois demander de l’aide.

 

♦ Quelles sont les actions menées au niveau de la prévention du jeu excessif?
« Nous intervenons en prévention du jeu excessif dans 25 lycées et CFA du Loiret
hebdomadairement afin de faire connaître notre association, nos dispositifs d’aides et de prises en
charge.

Nous intervenons bien évidemment dans le cadre du jeu vidéo mais également pour toutes les autres
addictions ou conduites addictives.

Dans le cadre du jeu excessif nous essayons d’aller potentiellement partout où l’on peut croiser un
bon ratio de joueurs et de parents de joueurs. Nous avons évidemment participé au salon du jeu
vidéo Orléanais : l’Orléans Game Show mais également à l’événement Welcome in the Game
organisé par la mairie d’Orléans. »

Welcome in the game – Orléans Game Show

 

♦ Comment reconnaître les signes du jeu excessif ?
« On ne peux pas parler de signe fiable à 100% mais plutôt d’un ensemble de choses.
Quand un jeune ou un parent vient nous voir dans le but de faire le point sur une conduite addictive
au jeu vidéo nous essayons de regarder dans plusieurs directions afin de trouver des indicateurs.
Est ce que le jeune est scolarisé, a t-il des difficultés à l’école, est ce que le jeune a des amis ayant
les mêmes conduites addictives ? On regarde également le temps qu’il passe à jouer par jour ou par
semaine, on essaye de dialoguer avec lui sur son jeu, est ce qu’il a déjà essayé d’arrêter de jouer et
n’a pas réussi, pense t-il aux jeux vidéos toute la journée, saute t-il des repas pour jouer plus
longtemps ? Il n’y a pas de signe fiable à 100% parce que chaque joueur est différent mais on peut
tout de même trouver des indices.

Un autre indicateur, assez révélateur est de se demander si le jeune préfère jouer, enfermé chez lui
plutôt que de passer du temps dehors.
Il faut savoir différencier le jeu excessif et le jeu plaisir. Il y a tout de même une différence entre le
joueur qui modifie son hygiène de vie et freine son insertion professionnelle à cause du jeu vidéo et
le joueur qui joue beaucoup uniquement durant une certaine période comme à la sortie d’un nouveau
jeu ou pendant les vacances si toutefois le joueur se régule par la suite.

Il faut également différencier certains stades de la vie notamment l’adolescence, période où il est
normal d’être attiré par les jeux vidéos et d’y jouer et le passage à l’âge adulte si cela entraîne des
difficultés pour trouver du travail notamment. On soulignera aussi qu’a l’adolescence les passions
sont décuplés et souvent poussés à l’extrême contrairement à d’autres périodes de la vie. »

Crédit photo HouseOfCards

 

♦ Phénomène récent ?
« La Station Travaille sur le jeu excessif depuis 7ans. Suite à ce phénomène croissant un binôme jeu
a été crée en 2015. Le phénomène est donc récent, lié à la multiplication des écrans dans les foyers
mais également à des expériences de jeux de plus en plus poussées avec la réalité virtuelle,
l’évolution et la qualité des graphismes ainsi que le jeu en ligne. »

 

♦ L’évolution du gaming (e-sport – compétitions), les jeux en ligne omniprésents et les plateformes de streaming comme Youtube ou Twitch poussent-ils au jeu excessif ?
« On ne peux pas dire que l’évolution du gaming incite à avoir un jeu excessif mais effectivement,
de fait, puisque de plus en plus de gens sont exposés à cette tendance, les personnes les plus
vulnérables auront plus de chance de tomber dans cette dépendance. Pour avoir un exemple
flagrant, si vous ne croisez jamais le tabac vous n’avez que très peu de chance de commencer à
fumer. A contrario, si tout le monde fume autour de vous alors vous allez être amené à être plus
vulnérable à cette dépendance.

Les plateformes comme twitch ou youtube n’ont pas que des points négatifs et permettent même de
développer l’esprit créatif de nombre de joueurs. Pour les joueurs ayant et alimentant une chaîne
Youtube de gaming par exemple il y a un aspect positif dans le sens ou cela prends beaucoup de
temps de créer une introduction pour une vidéo, de choisir les musiques, les bons clips, de monter
une vidéo. Cela leur permet également de travailler leur éloquence puisqu’une vidéo avec un
youtuber ne sachant pas s’exprimer correctement ne fonctionnera pas. Enfin, les jeunes peuvent se
jauger à travers les autres avec les likes, les pouces bleus. Narcissiquement au bon sens du terme
c’est très intéressant.

Depuis quelques années Youtube et Twitch se disputent le marché du streaming jeu vidéo

Il peut également y avoir un système de partage et d’entraide pour montrer ce que chacun sait faire,
expliquer aux autres joueurs comment se débloquer d’une situation, comment débloquer des
personnages, réaliser des défis etc. »

 

♦ Quels jeux rendent le plus addict ?
« Mmorpg (jeu de rôle), rts (jeu de stratégie en temps réel) et fps (jeu de tir à la première personne) sont les styles de jeu rendant le plus addictifs.

En cause, l’importance du classement et le fait que le jeu continue quand on est hors ligne.
Nous recevons beaucoup de jeunes qui s’expriment sur ce style de jeux.
Beaucoup nous expliquent leur jeu excessif par le fait qu’ils sont appelés à jouer par leurs amis,
notamment pour réaliser des quêtes/missions et que s’il ne jouent pas, leur team risque de leur en
vouloir, voire de les exclure.

L’univers chronophage de ces jeux est également addictif dans le sens où l’on ne se rends pas
compte du temps que l’on passe sur le jeu et les développeurs l’ont bien compris. Au jour
d’aujourd’hui beaucoup de jeux de ce type sont des jeux « illimités » dans le temps et l’espace. Les
MMORPG et RTS sont terribles pour ça car le jeu, l’environnement, évolue en continue sans jamais
s’arrêter. Si je quitte le jeu il ne s’arrête pas pour les autres, il y a donc un enjeu à rester pour ne pas
perdre sa place et son classement. »

 

World Of Warcarft est un des Mmorpg les plus joué au monde

 

♦Une fois conscient du jeu excessif, que faire ?
« Le jeune comme les parents peuvent venir nous voir directement ou bien nous contacter par
téléphone.

Le premier rendez-vous sert à faire une évaluation, faire connaissance, voir ce qui peut poser
problème, voir où on en est du jeu et dans la vie en générale. On aborde différents thèmes variés.
On essaye de voir ce que le jeune attends de nous, ce qu’il veut mettre en place et avec qui. Nous
avons dans l’association des travailleurs sociaux, des infirmiers, des psychologues et d’autres
professionnels. Nous sommes tous formés et pouvons les accompagner. Si à n’importe quel moment
le binôme jeune-intervenant ne fonctionne pas on peut changer d’interlocuteur.

Les parents peuvent également venir seuls et peuvent être aiguillés, conseillés sur le positionnement
à adopter, le cadre à mettre en place mais également l’attitude à adopter en cas de crise.
Entourage et jeunes peuvent être reçus en toute confidentialité. En fonction de l’âge du jeune nous avons des outils différents pour faciliter la discussion, nous n’aurons pas la même approche avec un enfant de 10ans qu’avec un jeune de 18ans. »

 

♦ Est ce que ça se soigne comme n’importe quelle autre conduite addictive ?
« La première évaluation va être quasiment identique pour toutes les conduites addictives. Nous
essayons de comprendre l’environnement dans lequel évolue la personne, si elle est scolarisée, si
elle a des parents aidants, travaille,si cela se passe bien, si elle a des amis qui jouent comme elle,
son caractère. Quelqu’un de timide par exemple aura souvent tendance à surinvestir le jeu.
Bien sûr la prise en charge sera différente des autres produits car il n’existe pas de produit de
substitution comme pour le tabac par exemple.

En réalité on essaye d’apprendre aux jeunes à devenir experts de leurs pratiques, pour que euxmêmes
sachent reconnaître à quels moments ils vont jouer ou s’enfermer plus facilement, on
collabore et on essaye de construire quelque chose ensemble.

Il faut également savoir travailler sur la motivation. On le voit chez les fumeurs, beaucoup
souhaiteraient arrêter mais n’ont pas la motivation, ce n’est pas qu’ils mentent mais simplement qu’il
y a quelque chose qui les retient. C’est cela que l’on essaye de travailler sans qu’il n’y ai forcement
besoin de thérapie. Dans certains cas il y a besoin et dans ce cas la un psychologue est la pour
prendre en charge, les écouter et les aider mais il faut surtout et avant tout que le jeune soit acteur
du projet, si l’on impose des règles sans concertation (et le plus souvent au moment de
l’adolescence) il y aura forcement conflit. »

 

Crédit photo SOS Addictions

 

♦ Y’a t-il des bienfaits du Jeu vidéo ?
« Bien sur qu’il y a des bienfaits, des avantages et heureusement. Tout d’abord on peut évoquer le
fait que cela développe la motricité. Un phénomène nouveau c’est l’intérêt des entreprises pour les
joueurs de jeux vidéos qui savent souvent exécuter de nombreuses tâches en même temps et ont
développé une motricité et une créativité plus importante qu’une personne lambda.

Les jeunes joueurs sont très forts en informatique, s’intéressent à la création de page internet, ont
parfois une bonne connaissance en codage, c’est un point positif pour leur futur professionnel.
L’apprentissage des règles également est à souligner notamment avec les jeux en ligne où il est
question de bannissement si l’on ne respecte pas les règles. Les jeux-vidéos apprennent également la
cohésion, l’esprit d’équipe, la coopération. L’élaboration de stratégie et la résolution de problème
sont des bienfaits qui peuvent être transposés dans la vie réelle. Lorsque je suis confronté à un
problème, une situation dans ma vie quotidienne je peux m’aider en me demandant ce que j’aurais
fait dans tel ou tel jeu vidéo et cela peut me permettre de me débloquer d’une situation complexe.

Au niveau de la socialisation la réponse sera divisée entre le oui et le non. Le jeu en ligne permet de
rencontrer, de discuter avec d’autres joueurs, de se faire des amis virtuels. On va également jouer
aux même jeux que nos amis réels donc cela donne un sujet de conversation quand on se voit. La où
ça devient problématique c’est quand le jeune s’enferme complètement dans le virtuel et n’en sort
pas. »

 

♦ Avez vous des conseils à donner aux parents et aux joueurs ?
« Si l’on devait donner un conseil aux parents ce serait simplement de discuter avec leur enfant.
Certains parents diabolisent le jeu vidéo et pensent que si les notes baissent c’est forcement lié au
jeu vidéo, que si le jeune se renferme sur lui même c’est forcément lié au jeu vidéo alors que cela
peut être l’inverse, certains se servent du jeu comme une carapace, comme un refuge pour échapper
à leurs problèmes du quotidien.

Il ne faut pas dénigrer le jeu vidéo si cela est une passion de l’enfant car cela peut créer une cassure, rompre le dialogue. Il faut essayer de s’y intéresser, cela peut créer un terrain d’entente et peut permettre d’avoir un débat constructif, « à quoi tu joues ? Tu ne trouves pas que tu joues trop ? Qu’est que ce tu en penses ? » »

 

♦ Y’a t-il des préconisations pour les joueurs ?
Effectivement il y a des recommandations qui peuvent être appliquées pour jouer dans des
conditions plus idéales.
• Une source de lumière naturelle ou une lampe derrière l’écran est important.
• La bonne distance de l’écran est d’environ 3 fois la diagonale de l’écran. Si mon écran fait 107cm il
faudrait que je soit au moins à 3m20 de celui-ci pour jouer.
• Une pause de 30 minutes toutes les heures environ est recommandée.
• Enfin, il est préconisé de ne plus regarder d’écran 1h avant le coucher, préférez donc un livre.

 

♦ Y’a t-il des préconisations pour les parents ?
Il existe des préconisations également pour les parents.
• Prendre connaissance de la classification PEGI qui determine pour chaque jeu l’age minimum
recommandé. (www.PEGI.info)
• Définir des temps de jeux selon l’age de votre enfant et du jeu
• Augmenter vos connaissances des jeux vidéos afin de pouvoir débattre avec votre enfant
• Jouer avec eux quand et si cela est possible
• Mettre les écrans dans les pièces de vie commune
• Prévoir d’autres activités afin de ne pas simplement proposer comme alternative à votre enfant
d’arrêter de jouer sans rien derrière.

« Il faut savoir également que chaque joueur est différent, pour certains jouer 2 heures par semaine
va créer des difficultés tandis que chez d’autres 2 heures par jour n’aura pas d’effet. Il faut également
permettre au jeune d’être acteur de la négociation. Un jeune qui a l’habitude de jouer 5 à 6 heures
par jour ne pourra sûrement pas être cantonné à 30min ou 1h. S’il n’y a aucune négociation possible
il n’y aura aucune adhésion au programme de sa part et ce sera un échec. La clé du jeu excessif
réside dans la négociation entre parents et enfants. »

Les symboles PEGI peuvent indiquer l’âge minimum conseillé pour le joueur mais également si le jeu comporte de la violence, drogue etc..

 

♦ Tisseron et la règle du 3-6-9-12
Afin d’aider les parents à se situer le docteur TISSERON à crée la règle du 3-6-9-12.

Avant 3 ans : Aucun écran. L’enfant a besoin de découvrir son espace, toucher, sentir, goûter,
développer ses sens, si on lui colle un écran il va rester scotché et ne pas développera pas ses sens
de manière optimale.

Avant 6 ans ; On peut commencer un peu les écrans mais sur un programme, un dessin animé
prédéfini par exemple où l’on peut discuter avec l’enfant. Entre 3 et 6 ans c’est le moment où il va
découvrir sa créativité donc les écrans sont à utiliser avec parcimonie. Il en faut un petit peu mais il
faut qu’il s’adonne aux activités manuelles, qu’il fasse de la pâte à modeler, dessine, etc.

Vers 9 ans : On peut débuter internet mais accompagné par les parents. Il faut leur donner quelques
règles à respecter et surtout leur expliquer. Certains accidents d’internet se produisent parce que
certains jeunes n’ont pas conscience de leur exposition au monde quand ils postent. Il faut savoir
leur expliquer qu’à partir du moment où l’on poste ça tombe dans le domaine public, leur expliquer
que toutes les infos qui sont sur internet ne sont pas forcement vraies. Cela peut sembler évident
pour nous mais un jeune qui débute ne peux pas le savoir si personne ne lui a jamais dit. C’est le
rôle des parents d’apprendre tout ça aux jeunes et cela peut éviter la publication de photos
compromettantes, le chantage et bien d’autres problèmes.

Vers 12 ans : Le jeune peut naviguer sur internet seul, dans un temps défini et avec un contrôle
parental.

Serge Tisseron est un psychiatre, psychanalyste français. Il est depuis 2015 membre de l’Académie des technologies et est à l’origine de l’oeuvre « Apprivoiser les écrans et grandir 3-6-9-12 »

 

♦ Le jeu du moment : Fortnite Battle Royale.
Azélie : « Je ne joue pas mais je connais parce qu’on essaye de se renseigner sur les sorties, les jeux
du moment, ceux qui buzzent et de faire un point avec l’équipe pour être au clair et comprendre de
quoi les jeunes nous parlent en entretien. C’est un jeu dont on entends beaucoup parler en ce
moment puisqu’à peu près tout les jeunes que nous recevons en entretien y jouent. Je pense que le
succès de ce jeu est lieu à son coté phénomène, gratuit, à son côté humoristique-ludique avec les
danses ou les skins par exemple.

Le jeu est violent parce que le but est quand même de tuer ses adversaires mais
avec son côté cartoon il est beaucoup moins violent que d’autres jeux réels tels que PUBG. Les
parties sont assez courtes, le jeu est fractionné en saisons avec des défis, des objectifs pour gagner
des personnages etc, ça donne une vraie dynamique au jeu. »

Infos pratiques:

10bis Boulevard Rocheplatte – 45000 Orléans

02.38.42.22.01

Ouvert du Lundi au Vendredi de 14h00 à 18h00.

Ouvert le samedi matin 2 fois par mois.

Kévin B.

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